La récente “crise du gaz russe”, dont les implications sont désormais politiques et diplomatiques,
nous fournit une nouvelle occasion de constater la dépendance de l’Union Européenne et de la
France à l’importation de gaz étranger.
Fondateur de BCO CONSEIL, Cabinet de conseil en stratégie industrielle & ENR
La France, ne générant que 2% de ses besoins en gaz, se voit particulièrement dépendante de la
Norvège (36% du gaz importé) et de la Russie (17%). Viennent ensuite d’autres pays tels que l’Algérie
(8%), les Pays-Bas (8%) et le Nigéria (7%). La France gagnerait naturellement à s’affranchir des risques
politiques de ses fournisseurs.
Représentant 17% de la consommation d’énergie en France, et malgré les annonces d’interdiction de
son utilisation dans l’habitat de demain, le gaz naturel demeure une source d’énergie significative.
D’une part, plus de la moitié du gaz (53%) nous parvient de méthaniers, sous forme de gaz liquéfié.
Cette voie, si elle est développée, tendrait à limiter l’approvisionnement par gazoducs, tels que
NordStream 1 et 2.
D’autre part, nous savons et pouvons développer la production de gaz sur nos sols, par le biais du
biogaz, composé à 90 % de déchets. S’il représente aujourd’hui à peine 4% des énergies
renouvelables françaises, l’objectif fixé sur 2030 s’élève à 10%.
Néanmoins, la stratégie nationale en matière de gaz n’est qu’une partie de notre problématique.
L’enjeu n’est pas binaire et ne saurait consister à remplacer une énergie par une autre. D’une part
car nous n’en sommes pas encore capables techniquement, et d’autre part car il serait risqué de
retomber en état de dépendance vis-à-vis d’une seule manne énergétique.
Plus que jamais, il convient de découper les usages et anticiper le mix énergétique.
Afin d’envisager un système pérenne, vertueux et moins coûteux, les industriels doivent, à l’instar
des politiques nationales, s’orienter vers un mix énergétique.
Comment bâtir sa stratégie énergétique?
Autant de questions à se poser avant d’aborder la construction d’un nouveau modèle, alors que
l’augmentation de la demande est bien plus forte que la croissance de l’offre. Des pistes de réflexion
sont à l’étude tant chez les industriels qu’à tous les échelons de l’état, et de l’Europe, ce qui constitue
un véritable fourmillement dans lequel il est parfois difficile d’y voir clair.
Beaucoup seront tentés d’attendre que le paysage s’éclaircisse, que les grandes orientations soient
fixées et que les circuits se développent.
Pour autant, c’est encore une fois dans l’anticipation que se jouera la réussite de votre stratégie.
Nous l’avons dit, l’offre est à ce jour dérisoire en comparaison de la demande.
La loi du « premier arrivé, premier servi » s’applique donc à la contractualisation énergétique comme
à tout marché. Il est essentiel de prendre en compte pour cela les temps incompressibles d’analyse
des besoins, de comparaison des modèles et de constitution des contrats d’approvisionnement.
Une étude raisonnable sur un périmètre clairement identifié ne saurait être inférieure à 6 mois,
auxquels vous ajouterez 2 à 3 mois par pays étranger prospecté pour en connaitre les mécanismes, si
vous avez besoin de sourcer votre énergie en dehors du territoire national. Le total se monte vite à 1
an voire plus.
Au-delà des aspects « marché », viennent ensuite les questions de règlementation pour le transfert
du gain environnemental.
Une nouvelle fois, nous pouvons considérer que quelques mois seront nécessaires à une bonne
connaissance des pratiques, mais surtout, rien ne garantit que celles-ci vous conviendront.
Il faudra dès lors réaliser une ingénierie de contractualisation qui passe nécessairement par une
veille active des travaux législatifs, afin de pouvoir prendre des positions évolutives qui ne soient pas
sclérosantes pour la politique d’achat.
Le risque induit des surcoûts à court terme, afin de rester en capacité de saisir la bonne opportunité
dès lors que les planètes s’aligneront.
Accepter ces surcoûts et les prévoir dans votre budget énergétique vous permettra de vous
positionner rapidement le moment venu.
Votre industrie est une machine bien huilée, depuis les personnes jusqu’aux process.
Tout s’imbrique pour optimiser vos capacités de production. La qualité des énergies fait partie
intégrante de cette équation, et vous ne pouvez accepter un prix ou une quantité, il vous faut un
rendement.
Pour cela, différentes solutions existent : labels privés, usines de production certifiées, etc… Tout cela
a un coût, et réduit d’autant l’offre disponible. Viser les économies à court terme vous engage sur un
prix, mais rarement sur une qualité, et encore moins sur la continuité de vos approvisionnements.
Soyez attentifs à ce point, vous pourriez avoir fait l’affaire du siècle mais, auprès d’un fournisseur
défaillant, cela ne vous rapportera rien.
L’idée sur cette question est de bien définir votre besoin, et de sécuriser votre outil de production
en même temps que vos contrats, par la mise en place d’une charte qualité dans votre avitaillement
énergétique. Vous retrouverez ainsi en partie votre prime à l’achat convertie en image de votre
entreprise.
La gestion de vos énergies demande, on le voit bien, de repenser tout un système. Cela n’est ni
simple, ni naturel, mais demande une vision et du courage. Vous avez les deux ? Tant mieux, on se
lance…
A ce jour, votre entreprise est connectée aux réseaux traditionnels, se fournit dans les secteurs
énergétiques adaptés à ce que vous utilisez depuis longtemps, qui est éprouvé, et la transition
énergétique, vous l’envisagiez en passant du gaz naturel au biométhane. Parfait, sauf qu’il n’y a pas
assez de biométhane et que vos concurrents le veulent tout autant que vous.
Une refonte de votre modèle impose alors de la créativité, de réaliser une transition non pas
énergétique, mais industrielle :
Et pour être tout-à-fait complet, pensez à vos fournisseurs et sous-traitants : vous pourrez gérer vos
énergies mieux que personne. Si vos matières premières n’arrivent plus car votre fournisseur, lui, n’a
pas anticipé les siennes, ou que vos sous-traitants sont défaillants car ils ont des contrats exorbitants
et font flamber vos prix, tout cela n’aura servi à rien.
Faire adhérer vos contractants à votre charte qualité de l’avitaillement énergétique, et sécuriser
vos partenaires en leur garantissant un système gagnant-gagnant, est tout aussi important que ce
que vous réaliserez en interne.
Pour résumer, payer plus cher aujourd’hui vous permettra d’aller plus loin : ou comment la
contractualisation énergétique passe d’un marché « spot » à un investissement à long terme.
Soyez conscients qu’il y aura ceux qui seront prêts et les autres, qui ne seront plus concurrentiels en
raison de leur manque d’anticipation.
Autoconsommation, achat groupé, prise de participation dans des outils de production, vous
devenez désormais acteur au lieu d’être consommateur, et prenez en main votre avenir en même
temps que celui de vos contrats.
N’attendez pas, vous serez récompensés des surcoûts consentis à court terme lorsque cela aura
éclairci votre vision.
Sénèque : « Il n’est pas de vent favorable pour celui qui ne sait où il va »
Benoît COMFAITS
Conseil en Stratégie
Fondateur de BCO CONSEIL
Conseil en transition énergétique
BCO Conseil - Centre d'Affaires Le Carnot - 53 rue du Président Carnot - 52100 Saint-Dizier
support@bco-conseil.fr / 07 85 75 41 77 / Mentions légales / Politique de confidentialité